Du premier cri aux premiers mots, de babillage en bavardage, comment le langage naît-il chez l’enfant ? Quelle influence l’entourage de bébé a-t-il sur ce processus ? Comment repérer les maux qui se cachent parfois derrière les mots ? Tour d’horizon d’un développement qui en conditionne d’autres.
L’acquisition du langage : un sujet qui occupe bien des chercheurs, préoccupe bien des parents et intéresse de près les pouvoirs publics depuis quelques années. En mars 2001 a été élaboré et rendu public un rapport interministériel devenu plan d’action et repris dans une loi d’orientation en santé publique votée à l’Assemblée nationale le 29 avril 2004. Une loi qui contient 28 mesures destinées à favoriser chez tous les enfants la maîtrise du langage oral et écrit en vue d’une future insertion sociale et professionnelle réussie. Une loi qui vient corroborer les propos du célèbre linguiste Alain Bentotila, qui précise dans son ouvrage Le verbe contre la violence : « Etre parent, c’est être conscient que la maîtrise de la langue conditionne le destin scolaire et le destin social de ses enfants ».
Lenteur ne rime pas forcément avec problème de langage « Prévenir dès la maternelle », « identifier les enfants porteurs d’un trouble spécifique du langage »…voilà une nouvelle mission, désormais officielle, pour les enseignants et les équipes éducatives. Mais pas d’affolement pour autant : seuls 4 à 5% des enfants d’une tranche d’âge sont concernés par ces troubles, dont 1% seulement pour des troubles sévères. Donc, dans l’immense majorité des cas, tout se passe normalement, dans les temps. « A moins d’un problème neurologique ou physiologique grave, tous les enfants apprennent à parler, tôt ou tard » confiait Harriet Jisa, psycholinguiste et professeur des Universités à Lyon II, à notre confère La Croix en mars 2007. Pas de quoi s’affoler donc, même si votre petit semble être un peu « tardif ». Dans ce domaine comme dans bien d’autres, chaque enfant évolue à son rythme et Einstein lui-même était mutique jusqu’à trois ans. Ouf, nous voilà rassurés !
De 0 à 1 an : les prémices de la communication
Le système auditif du fœtus est opérationnel bien avant la naissance, ce qui signifie que le bébé est déjà familiarisé avec le langage avant de naître et ce qui explique qu’il soit, déjà à ce stade, particulièrement sensible à la voix de sa mère. Si ses cris de nouveau-né ne sont que des expressions de souffrances ou de malaise sans intention de communiquer, les parents, en les interprétant et en y répondant de plus en plus précisément, lui font prendre conscience que sa voix lui permet de communiquer.
Vers 3 mois, il commence à comprendre des mots simples et à gazouiller pour traduire un état de satisfaction. Vers 8 semaines, les voyelles sont acquises et, entre 12 et 16 semaines, l’enfant tient à sa manière de grandes conversations avec sa mère.Le rôle décisif de l’entourage dans l’apprentissage du langage. Il commence à varier ses vocalises et il est d’autant plus enclin à le faire que ses parents, ses frères et sœurs le sollicitent en gazouillant et vocalisant avec lui. Pour que l’enfant parle, il faut qu’il le désire. C’est pour cela que sa famille doit le stimuler.
A partir de 6 mois, on passe aux sons syllabiques, très différents des gazouillis. Bébé commence à former des syllabes simples comme « ma », « pa » ou « da » puis les double. Des sons qu’il associera au fil du temps à des significations grâce aux répétitions, aux précisions et aux démonstrations de son entourage. Ainsi viendra le premier mot, souvent « papa ».
A 1 an, bébé aura en moyenne acquis 5 à 10 mots. « Les premiers mots produits véhiculent un sens que l’enfant généralise à plusieurs objets ou situations qui présentent des caractéristiques communes. Par exemple, le mot « dodo » peut signifier « je vois un lit », « mon frère dort » ou encore « je veux aller au lit ». A ce stade, le langage ne peut se suffire à lui-même : la signification du mot dépend du contexte (gestes, environnement) » précise Marc Delahaie, médecin phoniatre et auteur de L’évolution du langage chez l’enfant, de la difficulté au trouble, aux éditions INPES (Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé). La grande victoire du sens arrivera un peu plus tard, à force d’échanges.